La diversité biologique représente le tissu vivant de notre planète, englobant la multiplicité des espèces, des écosystèmes et des patrimoines génétiques. Face à son érosion accélérée, estimée à un taux 100 à 1000 fois supérieur au rythme naturel, les systèmes juridiques nationaux et internationaux ont progressivement élaboré des dispositifs de protection. Cette fragilisation massive, principalement causée par les activités humaines, constitue une menace directe pour la résilience des écosystèmes et la pérennité des services écologiques fondamentaux. Le droit, en tant qu’outil de régulation sociale, s’est progressivement saisi de cette problématique pour instaurer un cadre normatif visant à enrayer cette perte et promouvoir une gestion durable du vivant.
Fondements juridiques internationaux de la protection de la biodiversité
La protection juridique de la biodiversité s’est d’abord construite à l’échelle internationale, reconnaissant le caractère transfrontalier des enjeux écologiques. La Convention sur la Diversité Biologique (CDB) adoptée lors du Sommet de la Terre de Rio en 1992 constitue la pierre angulaire de ce dispositif. Ce traité international, ratifié par 196 États, établit trois objectifs fondamentaux : la conservation de la diversité biologique, l’utilisation durable de ses éléments et le partage juste et équitable des avantages découlant de l’exploitation des ressources génétiques.
En complément de la CDB, plusieurs instruments juridiques sectoriels renforcent cette architecture normative. La Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES), signée en 1973, régule le commerce des espèces menacées en instaurant un système de permis. Elle classe plus de 38 000 espèces dans trois annexes selon leur degré de vulnérabilité et soumet leur commerce international à des contrôles stricts.
La Convention de Ramsar sur les zones humides (1971) protège ces écosystèmes particulièrement riches en biodiversité mais fragiles. Elle a permis de désigner plus de 2 400 sites d’importance internationale couvrant plus de 250 millions d’hectares. La Convention sur la conservation des espèces migratrices (Convention de Bonn, 1979) complète ce dispositif en protégeant les espèces animales qui franchissent régulièrement les frontières nationales.
Plus récemment, le Protocole de Nagoya (2010) a précisé les modalités d’application du troisième objectif de la CDB concernant l’accès aux ressources génétiques et le partage des avantages. Ce texte établit un cadre juridique transparent pour prévenir la biopiraterie et garantir que les communautés autochtones et locales bénéficient des retombées liées à l’utilisation de leurs savoirs traditionnels.
Les objectifs d’Aichi et l’Agenda post-2020
En 2010, les Objectifs d’Aichi ont été adoptés dans le cadre du Plan stratégique pour la diversité biologique 2011-2020. Ces 20 objectifs ambitieux visaient à enrayer la perte de biodiversité à l’horizon 2020, organisés autour de cinq buts stratégiques :
- Gérer les causes sous-jacentes de la perte de biodiversité
- Réduire les pressions directes exercées sur la biodiversité
- Améliorer l’état de la biodiversité par la sauvegarde des écosystèmes, des espèces et de la diversité génétique
- Renforcer les avantages retirés de la biodiversité et des services écosystémiques
- Renforcer la mise en œuvre par la planification participative
Le bilan mitigé de ces objectifs a conduit à l’élaboration du Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal, adopté lors de la COP15 en décembre 2022. Ce nouveau cadre définit 23 cibles à atteindre d’ici 2030, dont la protection de 30% des terres et des mers, la restauration de 30% des écosystèmes dégradés, et la réduction de moitié des risques liés aux pesticides.
Intégration de la biodiversité dans les législations nationales
La transposition des engagements internationaux dans les droits nationaux constitue une étape déterminante pour garantir l’effectivité de la protection de la biodiversité. En France, cette intégration s’est opérée progressivement à travers plusieurs textes majeurs. La loi relative à la protection de la nature de 1976 a posé le principe selon lequel « la protection des espaces naturels et des paysages, la préservation des espèces animales et végétales […] sont d’intérêt général ». Ce texte fondateur a notamment institué les études d’impact environnemental pour les projets d’aménagement susceptibles d’affecter l’environnement.
La Charte de l’environnement de 2004, intégrée au bloc de constitutionnalité français, a élevé la protection de la biodiversité au rang de principe constitutionnel. Son article 2 stipule que « toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement », tandis que l’article 6 promeut un développement durable qui ne compromette pas « la capacité des autres générations à satisfaire leurs propres besoins ».
Plus récemment, la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages de 2016 a marqué une avancée significative en consacrant plusieurs principes juridiques novateurs. Elle a reconnu le préjudice écologique dans le Code civil (article 1247), permettant la réparation du « dommage anormal causé aux éléments ou aux fonctions des écosystèmes ». Elle a créé l’Office français de la biodiversité (OFB), opérateur public chargé de la police de l’environnement et du soutien à la mise en œuvre des politiques publiques.
Cette loi a par ailleurs institué le principe de non-régression, selon lequel la protection de l’environnement ne peut faire l’objet que d’une amélioration constante. Elle a renforcé le mécanisme de compensation écologique en introduisant l’obligation de résultat et la pérennité des mesures compensatoires. Le dispositif des obligations réelles environnementales (ORE) permet désormais aux propriétaires fonciers de conclure des contrats de long terme avec des collectivités ou associations pour mettre en place des mesures de protection de la biodiversité sur leurs terrains.
Diversité des approches nationales
À l’échelle mondiale, les approches juridiques de protection de la biodiversité présentent une grande hétérogénéité. Certains pays ont opté pour des dispositifs particulièrement innovants. L’Équateur a reconnu dans sa constitution de 2008 les droits de la nature (Pacha Mama), considérée comme sujet de droit. La Nouvelle-Zélande a accordé en 2017 la personnalité juridique au fleuve Whanganui, reconnaissant son statut d’entité vivante et indivisible, conformément à la vision du monde maorie.
La Colombie a développé une jurisprudence avant-gardiste, sa Cour constitutionnelle ayant reconnu en 2018 l’Amazonie colombienne comme sujet de droits. L’Inde a renforcé sa législation sur les aires protégées tout en développant des mécanismes de partage des bénéfices avec les communautés locales. Ces approches témoignent d’une évolution du droit vers une reconnaissance accrue de la valeur intrinsèque de la nature, au-delà de sa simple utilité pour l’homme.
Mécanismes de protection des habitats et des écosystèmes
La préservation des habitats naturels constitue un levier primordial pour maintenir la diversité biologique. Les aires protégées, sous leurs diverses formes juridiques, représentent l’outil le plus répandu à l’échelle mondiale. Selon l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN), ces espaces sont définis comme « un espace géographique clairement défini, reconnu, consacré et géré, par tout moyen efficace, juridique ou autre, afin d’assurer à long terme la conservation de la nature ainsi que les services écosystémiques et les valeurs culturelles qui lui sont associés ».
L’UICN a établi une classification en six catégories d’aires protégées, allant de la protection intégrale (réserve naturelle intégrale, zone de nature sauvage) à des formes de protection permettant une utilisation durable des ressources naturelles. Cette typologie, reconnue internationalement, permet d’harmoniser les approches nationales tout en respectant la diversité des contextes.
En droit européen, le réseau Natura 2000 constitue la pierre angulaire de la politique de conservation de la nature. Fondé sur les directives « Oiseaux » (1979) et « Habitats » (1992), ce réseau couvre près de 18% du territoire terrestre de l’Union européenne et plus de 8% de son territoire marin. Il comprend des Zones de Protection Spéciale (ZPS) pour les oiseaux et des Zones Spéciales de Conservation (ZSC) pour les habitats et espèces prioritaires.
Le cadre juridique de Natura 2000 impose aux États membres d’évaluer l’incidence des projets susceptibles d’affecter significativement ces sites. L’article 6 de la directive « Habitats » prévoit qu’un plan ou projet ne peut être autorisé que si l’évaluation conclut qu’il ne portera pas atteinte à l’intégrité du site. En cas d’impact négatif, le projet ne peut être réalisé que pour des raisons impératives d’intérêt public majeur et moyennant des mesures compensatoires adaptées.
Protection des corridors écologiques
Au-delà des aires protégées, la préservation de la connectivité écologique est devenue un enjeu juridique majeur. Les corridors écologiques permettent le déplacement des espèces et les échanges génétiques entre populations, facteurs indispensables à leur viabilité à long terme. En France, la Trame Verte et Bleue (TVB) a été instituée par les lois Grenelle (2009-2010) pour identifier et préserver ces continuités écologiques terrestres (trame verte) et aquatiques (trame bleue).
Ce dispositif s’appuie sur des Schémas Régionaux de Cohérence Écologique (SRCE), désormais intégrés aux Schémas Régionaux d’Aménagement, de Développement Durable et d’Égalité des Territoires (SRADDET). Ces documents de planification identifient les réservoirs de biodiversité et les corridors qui les relient, et doivent être pris en compte dans les documents d’urbanisme locaux (PLU, SCOT). Cette articulation entre différentes échelles de planification territoriale vise à garantir la cohérence des politiques d’aménagement avec les enjeux de préservation de la biodiversité.
À l’échelle internationale, le concept de connectivité écologique transfrontalière gagne en reconnaissance juridique. La Convention sur les espèces migratrices a adopté en 2020 des lignes directrices pour la conservation de la connectivité. Plusieurs initiatives régionales ont émergé, comme le Réseau écologique paneuropéen ou le Corridor biologique méso-américain, témoignant d’une prise de conscience de la nécessité de dépasser les frontières administratives pour préserver les processus écologiques.
Protection juridique des espèces menacées
La sauvegarde des espèces menacées d’extinction constitue un volet fondamental du droit de la biodiversité. Les mécanismes juridiques développés à cet effet reposent principalement sur deux approches complémentaires : l’interdiction des activités nuisibles à ces espèces et la mise en œuvre de programmes de conservation active.
Les listes d’espèces protégées constituent l’outil juridique le plus répandu. En France, les articles L. 411-1 et suivants du Code de l’environnement interdisent la destruction, la capture, la perturbation intentionnelle ou encore la commercialisation des espèces figurant sur ces listes. Des arrêtés ministériels précisent, pour chaque groupe taxonomique, les espèces concernées et les modalités spécifiques de protection. Ces interdictions peuvent faire l’objet de dérogations strictement encadrées, accordées notamment pour des raisons de santé publique, de recherche scientifique ou dans le cadre de projets d’intérêt public majeur.
À l’échelle européenne, la directive Habitats et la directive Oiseaux imposent aux États membres de protéger les espèces d’intérêt communautaire. La première liste, dans ses annexes II et IV, les espèces animales et végétales nécessitant une protection stricte, tandis que la seconde établit un régime de protection pour l’ensemble des espèces d’oiseaux sauvages présentes sur le territoire européen.
Au niveau international, la Liste rouge de l’UICN constitue l’inventaire mondial le plus complet de l’état de conservation des espèces. Bien que dépourvue de valeur juridique contraignante, cette classification scientifique guide l’élaboration des politiques publiques et des instruments juridiques de protection. Elle évalue le risque d’extinction des espèces selon des critères rigoureux, les classant en neuf catégories allant de « préoccupation mineure » à « éteint ».
Plans nationaux d’action et conservation ex situ
Au-delà des interdictions, les plans nationaux d’action (PNA) pour les espèces menacées constituent des instruments stratégiques associant mesures réglementaires et actions positives de conservation. En France, ces plans, coordonnés par l’Office français de la biodiversité, définissent les actions nécessaires à la conservation et à la restauration des espèces les plus menacées. Ils mobilisent l’ensemble des acteurs concernés (administrations, gestionnaires d’espaces naturels, associations, chercheurs) autour d’objectifs partagés.
La conservation ex situ – hors du milieu naturel – fait l’objet d’un encadrement juridique spécifique. La Convention sur la Diversité Biologique reconnaît son rôle complémentaire à la conservation in situ. Les jardins botaniques, banques de semences, zoos et aquariums sont soumis à des réglementations concernant la détention d’espèces protégées et participent à des programmes coordonnés de reproduction et de réintroduction. Le Règlement européen sur les zoos (1999/22/CE) impose à ces établissements de contribuer à la conservation de la biodiversité par la recherche, l’éducation du public et la participation à des programmes de reproduction.
La lutte contre le trafic d’espèces sauvages, estimé à plusieurs milliards d’euros annuels, mobilise des dispositifs juridiques spécifiques. La CITES constitue le principal instrument international de régulation de ce commerce. Sa mise en œuvre en droit européen s’effectue via le Règlement (CE) n° 338/97 et ses règlements d’application, qui prévoient un système de permis et certificats pour le commerce des espèces inscrites aux annexes. Les infractions à ces dispositions sont sanctionnées pénalement, avec des peines pouvant atteindre, en France, sept ans d’emprisonnement et 750 000 euros d’amende pour les cas les plus graves.
Régulation des activités économiques impactant la biodiversité
L’encadrement juridique des activités économiques représente un levier majeur pour réduire les pressions exercées sur la biodiversité. Le principe d’évaluation environnementale s’est progressivement imposé comme un outil préventif incontournable. En droit français, l’étude d’impact, instituée par la loi de 1976 et renforcée par les réformes successives, impose aux porteurs de projets d’évaluer leurs incidences potentielles sur l’environnement, y compris sur la biodiversité. Cette procédure s’inscrit dans une démarche séquentielle connue sous l’acronyme « ERC » : éviter, réduire, compenser.
La séquence ERC constitue désormais un principe structurant du droit de l’environnement, codifié à l’article L. 110-1 du Code de l’environnement. Elle impose une hiérarchie dans le traitement des impacts : priorité absolue à l’évitement des atteintes à la biodiversité, puis à leur réduction, et en dernier recours, à leur compensation. Cette dernière étape vise à contrebalancer les impacts résiduels significatifs par des actions positives, selon le principe d’équivalence écologique et d’absence de perte nette de biodiversité.
La mise en œuvre de la compensation écologique fait l’objet d’un encadrement juridique de plus en plus précis. La loi biodiversité de 2016 a renforcé ses exigences en imposant une obligation de résultat et une effectivité pendant toute la durée des atteintes. Elle a créé de nouveaux outils comme les sites naturels de compensation, permettant aux maîtres d’ouvrage d’acquérir des « unités de compensation » auprès d’opérateurs spécialisés ayant réalisé des actions de restauration écologique anticipées.
Dans le secteur agricole, la Politique Agricole Commune (PAC) intègre progressivement des mesures favorables à la biodiversité. Les mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC) rémunèrent les agriculteurs qui s’engagent volontairement dans des pratiques respectueuses de l’environnement. Le verdissement des paiements directs conditionne une partie des aides au respect de pratiques bénéfiques pour la biodiversité, comme le maintien des prairies permanentes ou la présence d’infrastructures agroécologiques (haies, bosquets, mares).
Responsabilité environnementale et instruments économiques
La directive 2004/35/CE sur la responsabilité environnementale, transposée en droit français aux articles L. 160-1 et suivants du Code de l’environnement, a instauré un régime spécifique de responsabilité pour les dommages causés aux espèces et habitats protégés. Ce régime, fondé sur le principe pollueur-payeur, oblige l’exploitant responsable d’un dommage à prendre les mesures de prévention ou de réparation nécessaires, indépendamment de toute faute.
Les instruments économiques gagnent en importance dans l’arsenal juridique de protection de la biodiversité. Les paiements pour services environnementaux (PSE) rémunèrent les actions qui contribuent au maintien ou à l’amélioration des services écosystémiques. La loi de finances pour 2019 a créé un dispositif d’exonération fiscale pour ces paiements, facilitant leur déploiement. La fiscalité écologique, comme la taxe sur les activités polluantes ou les redevances pour prélèvement d’eau, vise à internaliser les externalités négatives des activités économiques sur la biodiversité.
La responsabilité sociétale des entreprises (RSE) intègre de plus en plus les enjeux de biodiversité. La directive européenne sur le reporting extra-financier, révisée en 2022 par la directive sur le reporting de durabilité des entreprises (CSRD), renforce les obligations de transparence des grandes entreprises concernant leurs impacts sur la biodiversité. En France, l’article L. 225-102-1 du Code de commerce impose aux sociétés cotées et aux grandes entreprises de publier une déclaration de performance extra-financière incluant des informations sur leurs actions en faveur de la protection de la biodiversité.
Vers une justice environnementale renforcée pour la biodiversité
L’effectivité du droit de la biodiversité repose en grande partie sur l’accès à la justice environnementale et sur l’existence de mécanismes de contrôle et de sanction adaptés. Ces dernières années ont vu émerger des avancées significatives dans ce domaine, tant au niveau procédural que substantiel.
L’accès à la justice environnementale, consacré par la Convention d’Aarhus de 1998, s’est progressivement élargi. Les associations de protection de l’environnement bénéficient d’un régime d’agrément qui leur confère une présomption d’intérêt à agir. La jurisprudence a par ailleurs assoupli les conditions de recevabilité des recours en matière environnementale, reconnaissant notamment l’intérêt à agir des associations locales non agréées dès lors qu’elles justifient d’un objet statutaire et d’une ancienneté suffisants.
Le préjudice écologique pur, reconnaissance juridique du dommage causé directement aux écosystèmes indépendamment de ses répercussions sur les intérêts humains, constitue une avancée majeure. Consacré par la jurisprudence dans l’affaire de l’Erika (Cass. crim., 25 sept. 2012), puis codifié aux articles 1246 à 1252 du Code civil, il permet la réparation des atteintes non négligeables aux éléments ou aux fonctions des écosystèmes. Cette réparation s’effectue prioritairement en nature, visant à rétablir l’environnement dans son état antérieur.
La répression pénale des atteintes à la biodiversité s’est renforcée avec la création de juridictions spécialisées. Les pôles régionaux spécialisés en matière d’environnement, institués en 2021, traitent les affaires complexes relatives aux atteintes à l’environnement. Le délit général de pollution (art. L. 173-3 du Code de l’environnement) et le délit d’écocide pour les cas les plus graves, créés par la loi Climat et Résilience de 2021, complètent l’arsenal répressif.
Innovations juridiques et perspectives
L’émergence du concept de droits de la nature représente une innovation juridique prometteuse pour la protection de la biodiversité. Plusieurs juridictions ont reconnu des écosystèmes comme sujets de droit : le fleuve Whanganui en Nouvelle-Zélande, le Gange et la Yamuna en Inde, le fleuve Atrato en Colombie. En France, une proposition de loi visant à reconnaître la personnalité juridique de l’environnement a été déposée en 2022, témoignant de l’intérêt croissant pour cette approche.
La justice climatique et la justice environnementale convergent progressivement dans la jurisprudence. L’affaire Grande-Synthe (Conseil d’État, 1er juillet 2021) a reconnu l’obligation pour l’État de respecter ses engagements climatiques, avec des implications indirectes pour la biodiversité. L’affaire Affaire du Siècle a conduit à la condamnation de l’État français pour carence fautive dans la lutte contre le changement climatique, soulignant les liens entre climat et biodiversité.
La constitutionnalisation de la protection de la biodiversité gagne du terrain à l’échelle mondiale. Plus de 150 constitutions nationales contiennent des dispositions relatives à l’environnement. En France, la tentative d’inscription de la protection de la biodiversité et de la lutte contre le dérèglement climatique à l’article 1er de la Constitution n’a pas abouti en 2021, mais demeure un objectif pour de nombreux acteurs.
Le dialogue des juges en matière environnementale favorise la circulation des normes et des concepts juridiques innovants. Les tribunaux nationaux s’inspirent mutuellement de leurs jurisprudences, contribuant à l’émergence d’un corpus juridique transnational de protection de la biodiversité. Les juges s’appuient de plus en plus sur les données scientifiques pour fonder leurs décisions, renforçant l’interface entre science et droit.
L’avenir de la protection juridique de la biodiversité réside dans le renforcement de l’effectivité des normes existantes et dans l’innovation juridique face aux défis émergents. La diplomatie environnementale poursuit ses efforts pour élaborer un cadre international plus contraignant. Le droit devra s’adapter à des enjeux complexes comme la régulation des nouvelles biotechnologies, la biologie de synthèse ou la géo-ingénierie, tout en garantissant une transition juste qui prenne en compte les dimensions sociales de la protection de la biodiversité.